Cancer du poumon : les femmes paient leur tribut
Une étude pilotée par Catherine Hill, épidémiologiste à l’Institut Gustave Roussy, dresse un tableau accablant.
En 15 ans, la mortalité par cancer du poumon a été multipliée par quatre chez les femmes de 35 à 44 ans. Selon les estimations, 7700 décès et 10000 nouveaux cas devraient être enregistrés dans la population féminine globale en 2010, ce qui fait du cancer bronchique le cancer le plus meurtrier chez elle après le cancer du sein. « Les femmes encourent les même risques que les hommes quand elles fument autant », souligne Catherine Hill. Outre le cancer du poumon, elles s’exposent à d’autres cancers ainsi qu’à diverses affections respiratoires et cardio-vasculaires. Ce constat alarmant intervient alors que la prévention porte enfin ses fruits chez les hommes. Chez ceux de 40 ans, la mortalité liée au cancer bronchique a ainsi été divisée par deux au cours des dix dernières années.
« On peut prévoir que l'épidémie va continuer chez les femmes au fur et à mesure que vieilliront les générations qui ont beaucoup fumé », notent les scientifiques. Elles sont en train de payer au prix fort les dividendes d’une égalité qu’elles ont recherché illusoirement en commençant à fumer « comme les hommes » en 1945. Si l’effet de mode était encore bien timide à cette époque les femmes fumaient en moyenne 0,1 cigarette par jour la consommation n’a cessé ensuite de progresser pour atteindre un pic de 3,4 cigarettes par jour en 1995. La même année, les hommes fumaient certes encore deux fois plus qu’elles, mais leur consommation décroissait déjà depuis dix ans. Or, la mortalité par cancer bronchique, qui est l’indicateur le plus spécifique des conséquences néfastes du tabagisme, s’observe avec un certain délai. Chez les quadragénaires, elle reflète une exposition au cours des 20 à 25 dernières années, la très grande majorité des fumeurs ayant contracté cette habitude vers l’âge de 15 à 20 ans. La mortalité à 70 ans est quant à elle liée au tabagisme des 50 dernières années.
Vers un ralentissement de la baisse de la mortalité
Tous âges confondus, la mortalité diminue régulièrement chez les hommes depuis 1993. « Ce succès est presque entièrement attribuable à la prévention du tabagisme parce que les autres expositions (professionnelles et pollution) ont une influence moindre et parce que le traitement du cancer du poumon a malheureusement peu progressé », estiment les épidémiologistes. Malheureusement, les ventes de cigarettes sont restées à peu près constantes entre 2004 et 2009 et les chercheurs craignent un ralentissement de la tendance à la baisse de la mortalité masculine. Les augmentations massives du prix du tabac resteraient le meilleur moyen de donner un nouveau coup d’arrêt au tabagisme.